Dans le film du réalisateur Laurent Wyss, Manfred Liechti incarne l’un des criminels les plus connus de Suisse, le retraité fou Peter Hans Kneubühl. Dans l’interview, Liechti raconte comment il a ressenti sa première rencontre avec Kneubühl en prison, pourquoi il pense que les visites de prison sont rendues extra désagréables et pourquoi il se met à gazouiller dans le film.
"J'avais l'impression d'être dans un aquarium"
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Dans le film "Peter K. - Seul contre l'Etat", Manfred Liechti joue le rôle du criminel Peter Hans Kneubühl.
Entretien avec Manfred Liechti
Par Geri Krebs
Manfred Liechti, vous avez pu rendre visite à Peter Hans Kneubühl en prison. Comment s’est déroulée cette visite et comment avez-vous vécu l’homme que vous avez incarné dans le film ?
La visite a eu lieu début 2019 à la prison régionale de Thoune. C’est un bloc sinistre qui fait déjà peur de l’extérieur. J’ai pu m’entretenir pendant exactement une heure avec Peter Hans Kneubühl et la visite a été précédée d’un long va-et-vient bureaucratique avant d’obtenir finalement une autorisation. Avant la visite, j’avais en tête des images de films américains sur les visites de prison. Je m’imaginais dans une pièce avec une table et un gardien de prison dans un coin, qui surveillait notre conversation. Mais dans la réalité, c’était plutôt
assez différent.
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Dites-nous en plus …*
J’aimerais tout d’abord décrire brièvement comment on accède à la prison en tant que visiteur. Je savais par le metteur en scène Laurent Wyss, qui avait déjà rendu visite à plusieurs reprises à Monsieur Kneubühl, qu’il n’était pas possible de réserver des dates de visite. Cela signifie qu’il faut repartir si quelqu’un est déjà chez lui en raison de la limitation des visites. Mais je suis arrivé le premier et j’ai eu de la chance. J’ai d’abord rencontré un fonctionnaire à l’entrée, derrière une épaisse vitre blindée. Celui-ci m’a salué par microphone en disant : “Carte d’identité ! – Permis de visite !” J’ai passé les deux papiers sous la vitre blindée, comme à un guichet CFF, et peu après, une porte s’est ouverte en appuyant sur un bouton. Je me trouvais dans un petit vestibule où une gardienne aimable m’a accueilli en me disant : “Vous pouvez aller juste là, au fond, dans la loge trois”. La “loge” était une pièce minuscule, d’un mètre cinquante de large et de deux mètres vingt de long, derrière laquelle se trouvait une vitre de séparation en verre blindé épais. Cela me faisait penser à un aquarium. Devant la vitre blindée, en guise de table, une planche emmurée et une chaise.
Mais Peter Hans Kneubühl n’était pas encore là ?
Non, il est entré de l’autre côté de la vitre blindée. Il m’a remercié très poliment de lui rendre visite, de m’intéresser autant à lui et même de jouer son personnage. J’étais soulagé, car j’avais déjà lu des journaux et des notes de lui. Il y avait décrit à plusieurs reprises comment il se sentait observé et persécuté par l’État. Je m’étais donc préparé à ce qu’il interprète ma visite de la même manière : Maintenant, il y a un autre type qui vient m’espionner en prison…